… la Compagnie parisienne Les Krilati est ainsi venue présenter “Fando comme Lis”. Par deux artistes habités : Rocco Le Flem en Fando et Caroline Siméon en Lis. Tout commence dans une gare déshumanisée. Le train ne s’est pas arrêté, et c’est tant mieux. Quelques 200 personnes – dont de nombreux enfants – ont pu assister à un amour naissant, au son d’une musique de l’Est tantôt rythmée tantôt “pausée”. Une cadence exacte, une belle complicité. Les grands aiment la grâce des deux circassiens dans leurs mouvements. Les petits s’amusent de leurs petites querelles taquines, enfantines, amoureuses. Quand l’une sourit pour avoir le bonbon que l’autre sort de son pantalon miteux, lui le mange. Quand lui veut se faire pardonner, offrant la fleur symbole, elle rigole à le faire tomber. Et s’ensuit un jeu de séduction incessant, un “je t’aime moi non plus” que la musique gainsbourienne aurait pu accompagner. Et des acrobaties, entre trapézisme, équilibrisme et corde non sautée. Un envol en haut de la gare d’une beauté saisissante. Planant, envoûtant. Les paroles n’ont pas de place ici tant le jeu des artistes suffit. Un autre train repasse. Et s’arrête, cette fois-ci. Lis regarde son Fando la quitter, image d’une parenthèse passionnée terminée. Seule, les trains passent. Elle pleure dans son drap blanc par un accordéon lancinant. C’est vraiment leur beauté singulière qui impressionne. Tout concorde. Et tout s’accélère. Car Fando revient, tente de la convaincre de l’aimer pour de bon. Il tombe, se relève. Elle l’évite, mais s’inquiète. Elle ne peut vraiment l’ignorer. L’accordéon s’emballe à nouveau. Ils grimpent à la poutre de la gare d’une aisance et d’une maîtrise qui en feraient oublier l’exercice de force demandé. Le public s’emballe avec eux, soupire quand Fando se laisse tomber et se rattrape au dernier moment. Ils sont beaucoup applaudis, encouragés. Et quand – enfin – ils s’embrassent, cachés, sous le parapluie blanc de la belle femme qui protégeait de l’orage sonore, Les Krilati triomphent. Beau spectacle, beau choix, belles personnes. La Compagnie Les Krilati, si elle symbolise le cirque nouveau, le fait véritablement bien.